Le Havre - le port
De part sa situation géographique stratégique, le port du Havre est tout d'abord créé à des fins militaires par François Ier. Porte d'entrée vers Rouen et Paris, porte de sortie vers la Manche, puis le monde entier, la cité se développe très rapidement et devient un port de pêche et de commerce (vers les colonies) très florrissant. Les grands explorateurs y embarquent vers l'Amérique avant qu'une liaison transatlantique régulière soit inaugurée dès 1784. Au 19ème siècle, le Havre est happé par la mode des bains de mer. Les croisières vers l'Amérique sont à la mode, les vapeurs remplacent les voiliers, le tramway tiré par des chevaux fait son apparition dans la ville en lien avec le port, l'éclairage se fait au gaz. La modernité accélère le mouvement de la vie.
1891
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Le Havre n'a aucun secret pour Eugène Boudin. Né à Honfleur, c'est "en face", au Havre, qu'il déménage avec ses parents à l'âge de 9 ans, 51 grand Quai. Père marin sur la liaison le Havre-Hambourg, puis le Havre-Paris, enfin Le Havre-Honfleur (sur le Français), mère femme de chambre sur les bateaux de la liaison Le Havre- Rouen, Eugène hérite très tôt et naturellement du goût pour la mer de ses parents et à l'âge de 10 ans, devient mousse sur le batelet que commande son père (jusqu'à ce qu'il devienne commis chez un éditeur-imprimeur). A bord des vapeurs, il croque déjà ce qu'il voit dans les marges des livres à l'instar de ses cahiers d'écolier sur lesquels sont dessinés oiseaux et feullages.
Le Havre, entrée du port - Eugène Boudin - 1863
En janvier 1863, Boudin est au Havre et y épouse Marie-Anne Guédès. Il vit alors à Paris mais sa vie s'organise dès à présent entre la capitale et la côte ouest, commençant tout d'abord par la Normandie.
Le Havre, le festival des régates - Eugène Boudin - 1869
Bateau commerce, bateau voyage, bateau loisir, le port et ses activités diverses sont des éléments indissociables du travail du peintre marin d'autant que le port du Havre est en plein essor grâce au commerce. Il en découle de nombreuses vues différentes d'un même site sans toutefois perdre de vue le thème de prédilection de Boudin, le ciel.
Ciel orageux sur l'estuaire - Eugène Boudin - 1894
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Né à Paris, Monet enfant et sa famille emménagent au Havre et il y passe toute sa jeunesse. Il contenuera d'y faire de nombreux séjours, tant pour des raisons personnelles que professionnelles. Monet est partagé entre sa famille havraise et sa "maîtresse", qui lui donne un fils à Paris en juillet 1867. A peine le nom de son fils enregistré dans le registre d'état civil que Monet est déjà de retour au Havre, laissant la jeune femme seule et sans argent, suppliant d'argent comme à son habitude son ami Bazille. Il peint sans relâche de nombreux endroits au Havre et à Sainte-Adresse, notamment sa famille normande, pour tenter se subvenir aux besoins de sa nouvelle famille.
Navires sortant des jetées du Havre - Claude Monet - 1867
Son voyage en Normandie se prolonge en 1868 et sa relation avec Camille et Jean n'est faite que de rares et brefs passages à Paris. "Navires sortant des jetées du Havre" est un des deux tableaux accepté au Salon de 1868, le tableau refusé étant "la jetée au Havre".
Un journal caricature le tableau accepté :
Il était un ...très gros navire
très bien peint par M. Monet
Qui file vite et semble dire :
Go ahead ! time is money !
La jetée au Havre - Claude Monet - 1868
Le Grand Quai au Havre - Claude Monet - 1872
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"Donner une idée du mouvement, de la vie, de l'atmosphère du port si peuplé de bateaux fumants, des ponts, des cheminées, des quartiers de la ville dans la brume, le brouillard, de soleil couchant... En fait j'ai fait ce que j'ai vu et senti" écrit Camille Pissarro.
Le projet initial de Camille Pissarro était de se rendre une nouvelle fois à Dieppe. Toutefois, cédant à l'insistance d'un collectionneur havrais, Pissarro, âgé (73 ans), arrive donc au Havre l'été 1903, prenant ses quartiers à l'Hôtel Continental avec vue sur le port. Ses sujets de prédilection sont alors sous ses yeux : lumières changeantes, activité porturaire, bateaux, d'autant plus que le port est en grand chantier d'agrandissement et qu'il compte immortaliser cette historique évolution. Ces oeuvres viendront compléter la série des ports de Rouen et de Dieppe commencée 20 ans auparavant, comprenant près de 120 toiles.
L'anse des pilotes au Havre - Camille Pissarro - 1903
Pissarro écrit : "J'attends un amateur qui désire voir mes motifs du port. Il paraît que c'est très important au point de vue historique et documentaire ! On est en train de démolir le port pour en construire un plus vaste, quand ce sera démoli ce sera paraît-il unique ! ». Pissarro profite de l'opportunité de ce changement pour espérer atteindre la renommée tant désirée depuis toujours.
La jetée, marée haute, soleil du matin - Camille Pissarro- 1903
Toute cette énergie permet à Pissarro de réaliser 26 toiles mais il n'en connaîtra pas le succès commercial désiré, succombant à Paris un mois et demi après son séjour.
Le port du Havre marée haute - Camille Pissarro - 1903
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